Les journalistes ont mal tourné

Trouvé sur Bakchich.info cet entretien avec Philippe Cohen, red chef de Marianne2.fr et co-auteur avec Elisabeth Levy d’un livre (« Notre métier a mal tourné« ) dressant un état des lieux inquiétant de notre profession. Je n’ai pas encore lu le livre mais certains passages de l’entretien sur la précarisation des journalistes sonnent assez juste. Par ailleurs je partage assez son étonnement de voir que les grandes enquêtes se publient désormais dans des livres dont on réserve les bonnes pages pour le magazine employeur de l’auteur, façon de limiter les risques (j’en parlais ici à l’occasion d’une discussion avec Jean Guisnel du Point).

Je ne connais pas Philippe Cohen, j’aime assez ses réflexions même si je déteste son moralisme et que je n’oublie pas qu’on lui doit les chapitres les plus inutiles et emmerdants de « La face cachée du Monde » (Merci Pean pour les autres chapitres). Pour l’anecdote je lui dois pourtant d’une certaine façon ma carrière quand jeune journaliste mal payé (déjà) en 1994 je l’avais contacté à Info Matin pour lui proposer comme à d’autres des articles sur l’émergence de l’internet. Le quotidien Info Matin qu’il codirigeait et était justement le précurseur des rédactions où des journalistes crachaient des dépêches au kilomètre (je dis ça juste pour relativiser et rappeler que l’âge d’or du journalisme n’a jamais vraiment existé).

Il s’agissait d’une enquête montrant comment les réseaux de la pornographie financaient dejà certains acteurs du réseau (c’était quand même 12 ans avant que la presse ne découvre les activités privées du fondateur de Free). A l’époque il m’avait blackboulé avec hauteur et un ton vaguement ennuyé m’expliquant « qu’un peu de cul ça ne fait de mal à personne »! Je ne lui en veux pas du tout, il n’avait pas tort. Simplement, lassé de proposer des piges sur le sujet, c’est à l’issu de notre brève conversation que j’avais décidé de plaquer mes rêves de presse quotidienne pour rejoindre la presse magazine et me consacrer à Internet.

Merci Philippe, et n’oublie pas les petits gars de l’étage en dessous.

> MAJ 11/02/08 – A lire la note de lecture de Narvic sur ce bouquin anxiogène

7 réflexions sur “Les journalistes ont mal tourné

  1. Bonjour,

    J’ai fini ce livre étrange et stimulant il y a deux jours. C’est très curieusement ficelé, entre récit et analyse, réflexion philosophique et prospective.
    Il s’en dégage un curieux sentiment de mélancolie du journalisme…

    Sans concession dans l’attaque (Edwy Plenel notamment en prend pour son grade, et toute la profession avec lui, dans un intéressant démontage de la débâcle totale du journalisme d’investigation et la dérive justicière de « l’idéologie du journalisme » ), Cohen et Lévy ne sombrent pourtant pas dans l’alarmisme.

    Ils voient un petit rayon de soleil dans les récentes crise du Monde et des Echos (« les société de rédacteurs se réveillent-elles ? »)

    Et l’avenir du journalisme sur internet se présente en rose et en gris : c’est plutôt gris aujourd’hui, mais il y a un peu de rose tout de même…

    Comme d’habitude, on en trouve une note de lecture détaillée dans « La bibliothèque de narvic » 😉

  2. Bonjour.

    Vous aviez fait un lien sur « activités privées du fondateur de Free » mais il ne fonctionne pas. J’aurais aimé lire ce lien. Pouvez-vous me le donner?

    Merci.

  3. Toute la question est de savoir si la presse traditionnelle trouvera sa place sur Internet ou si Internet est en train de créer les grands journaux de demain. Je penche plutôt pour la seconde solution car la plupart des versions en ligne des vieux médias n’exploite pas la richesse fonctionnelle du web.

    Mais rien n’interdit de penser que les journalistes de la presse traditionnelle migreront vers les nouveaux titres.

    P.S. : Le lien vers Narvic est aussi mal formé. Un petit coup de fatigue, Emmanuel ? ; )

  4. Je viens également de finir le livre. Je suis également très partagé, j’ai vraiment eu beaucoup de mal à supporter les attaques sur Plenel et compagnie… Le livre commence comme un pénible réglement de comptes. C’est dommage car le reste du bouquin contient, par petites touches, des analyses que je trouve assez juste et que je constate également.

    MA bafouille là dessus:
    http://www.pierrefrance.com/onestmal/2008/ainsi-notre-metier-aurait-mal-tourne%E2%80%A6/

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