Wikipedia en mode « No Follow », c’est la fin des haricots

Jimmy Wales, patron de Wikipedia, vient très discrètement d’annoncer que les liens externes figurant dans l’encyclopédie collaborative seront désormais bridés par un attribut »No Follow » interdisant aux moteurs de recherche de « suivre » ces liens et d’améliorer ainsi le référencement des sites de destination. C’est la fin d’un petit business discret pour les professionnels du référencement et quelques spammeurs malins.

Lire aussi les inquiétudes un peu exagérées de Nicolas Carr sur le sujet…

Beaucoup avait en effet remarqué l’importance de ce type de lien à mesure que Wikipedia gagnait en légitimité et pertinence. Placer un lien sur Wikipedia était devenu un sport très prisé. Difficile de contrôler cette pratique, la pertinence des choix des sites de destination étant souvent affaire de jugement personnel. Fin de la récré plutôt que d’encourager le « link building » Jimmy Wales a décidé de neutraliser cette pratique sans l’interdire. Limitant l’intérêt mercantile de la pratique il espère ainsi limiter le spam et privilégier le sens et la qualité. Bien vu mais c’est aussi un coup de canif dans un système de valeur.

Il y a des petits signes qui montrent ça et là que l’on entre progressivement dans une phase de déconstruction de ce qui a lancé la deuxième vague de neteconomie triomphante. J’avais consacré un des premiers billets de mon blog sur ZDNet.fr, il y a tout juste deux ans, aux trackbacks (à l’époque nous étions un des premiers site de presse français à les intégrer dans nos articles quotidiens). Une technologie mise en place par la plate-forme Typepad, permettant aux blogs d’interagir entre eux et ouvrant la voie à une nouvelle économie de la diffusion des contenus. Une technologie vite neutralisée pour cause de spam. Neutralisée exactement de la même manière que pour Wikipedia.

Personnellement je salue la démarche qui consiste à limiter la porté de ces fonctionnalités sans pour autant les interdire mais il faut bien constater que dans le même temps on égratigne ce qui est à la base de l’écosystème des medias sur internet. En limitant ce qui a permis l’éclosion de nouveaux réseaux de distribution et le rééquilibrage du référencement entre petits et grands médias ont rabat impitoyablement le marché vers le règles de distribution traditionnelles, celles où l’on achète sa promotion par la publicité ou l’on pratique l’échange de notoriété entre sites à forte audience. Celles qui se mesurent en moyens financiers.

Je crains que l’on n’ait pas fini d’assiter à cette déconstruction du jardin d’Eden. Entre la chasse, légitime, contre le spam et l’optimisation des revenus des outils de recherche s’instaure peu à peu des barrières d’entrée de plus en plus puissantes pour accéder à la notoriété. La longue traîne a bon dos si l’on assiste a une concentration accrue de l’audience sur les sites les plus puissants ou si le prétexte de la pertinence conduit à réduire le choix des services. Voir sur ce point cette découverte très intrigante du Journal du Net sur des tests réalisés par Google en matière de positionnement des liens.

10 réflexions sur “Wikipedia en mode « No Follow », c’est la fin des haricots

  1. En effet, je ne vois pas pourquoi Internet échapperait aux lois du business et à l’attraction du pouvoir.

    A cet égard, ma définition du Web 2.0 = Web commercial, les aspects social et techno étant contingents.

    Cela dit, il n’y a qu’une seule « première page de Google » et je ne crois pas qu’elle soit la porte d’entrée ultime sur le Web.

    D’ailleurs je pense que cette année nous parlons bien sûr beaucoup de Web, mais que widgets, application de bureau riches (RDA) et applications mobiles vont nous donner l’occasion de redécouvrir Internet autrement.

    Même si aujourd’hui les contenus online sont majoritairement Web, le fameux « Web invisible » des bases de données existe déjà et est prêt à s’engouffrer dans de nouvelles interfaces via d’autres flux. La production de contenu aura rapidement d’autres alternatives que le « tout web ».

    Bref, les cartes sont distribuées mais ça se jouera en plusieurs parties, non ?

  2. Bonjour Emmanuel,

    Tu as tout à fait raison, les liens sont bien au coeur du nouveau paradigme Internet. Mais je suis moins inquiet que toi quant à la mesure d’ajustement décidée par Wales. Elle ne me semble pas de nature à enrayer la mécanique.
    Et puis, disons-le : Wikipedia n’était pas là pour ça !

  3. Je ne suis pas inquiet en ce qui concerne Wikipedia Romain, d’aillleurs j’applaudis… Par contre je constate que petit à petit ce qui a fait l’originalité de l’écosysteme tend à disparaître ou se retrouve marginalisé. Ce qui va rabattre tout le monde vers les moyens traditionnels de promotion laquelle sera bien sur monétisée (keywords, pub, etc…)

  4. Je ne vois pas l’interet d’arreter ce soit disant ‘manne’ pour les référencements. La pertinence des liens est exposée au même risque que les articles qui se trouvent sur wikipedia.

    Les ‘correctifs’ sont apportés par les contributeurs, et de la même façon un lien non pertinent se verrait sans doute enlevé par les éditeurs ou tout autre participant sur wikipédia.

    De plus, c’est aux moteurs de recherche de réguler leurs façons de crawler sur wikipedia (ce site est assez connu pour subir un traitement spécial de leurs parts, non ????). Que chacun fasse son métier, on dira !!!

  5. Je vous accorde que Wikipedia a beaucoup d’importance. Mais quand je lis un peu partout que l’initiative de Wales va tuer les médias sociaux, je trouve ça disproportionné.
    Les millions de blogs et bientôt de Wikis sont aussi les piliers de cet écosystème.
    Non, vraiment je pense que la réaction de certains est excessive.

  6. Une autre façon d’analyser cela est de dire « wikipedia ne le partage plus avec les moteurs recherche ». Cela est peut-être à relier avec le projet Wikiasari. Pourquoi wikipedia ferrait-il le travail de sélection des sites Internet gratuitement ? Machiavélique et assez théorie du complot, je sais 🙂

  7. Emmanuel,

    que penses-tu de cette nouvelle selon laquelle Microsoft paye des journalistes pour éditer des contenus de Wikipédia afin de les rendre plus favorable à MS?

    Un véritable problème d’éthique et de modération, n’est-ce pas?

    lien: Article Yahoo! News

    Cdlt,

    Julien

  8. Pingback: Toile-filante » Archive du blog » Wikipedia et nofollow, la vrai-fausse solution

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