Design: et si le web se lisait comme un parchemin?

Intéressante initiative du site design 2.0 qui étale côte à côte les pages d’accueil de plusieurs sites medias internationaux. Moches ou brillants? L’auteur s’interroge mais c’est surtout l’occasion de découvrir les 3 ou 4 grandes tendances: le style classique des quotidiens à la NYTimes en lignes serrées et multicolonnage très travaillé (jusqu’à présent mon style préféré), le graphisme brillant et coloré à la Sports Illustrated , le style web 2.0 à la Digg/Google finalement très pauvre et le style … scandinave proche du tabloïd trash se déroulant de façon interminable.

J’avoue que cela fait longtemps que le doute me prend face au succès du style scandinave. Ma culture personnelle m’éloigne totalement de ces choix graphiques exubérants mais ce succès mérite qu’on si arrête. En voyant la capture ci-dessous de ce magazine suédois je me demande si cela ne correspond pas à un nouveau mode de lecture que l’on aurait sous-estimé.

 expressen_se.jpg

J’ai toujours pensé, chiffres à l’appui, que la nécessité de dérouler la page d’accueil d’un site provoquait une dégradation de la consultation, de l’ordre de 25% par « écran ». Phénomène que connaissent très bien les régies publicitaires qui voient s’effondrer les taux de clic à mesure qu’on descend dans la page. Dans le cas du magazine suédois je me demande si une telle profondeur, démesurée et interminable (je compte 18 « écrans »!) ne correspond pas finalement à une lecture verticale comparable à celle d’un parchemin qu’on déroule. Je veux dire qu’un certain lectorat préfère peut être parcourir les contenus d’un magazine de cette manière plutôt qu’en naviguant par rubrique ou en s’enfoncant dans le site. C’est une vraie question qui me perturbe d’autant que la particularité de ces sites est aussi qu’ils sont totalement dépourvus de gadgets web 2.0 tout en proposant un haut niveau d’interactivité.

Et si on faisait fausse route?

21 réflexions sur “Design: et si le web se lisait comme un parchemin?

  1. D’après une étude de clickTale, réalisée entre novembre et décembre 2006 sur un échantillon 120 000 pages vues :
    – 91% des pages contiennent un ascenceur vertical
    – 76% des pages ont été scrollées
    – 22% des pages ont été scrollées jusqu’en bas.

    Les comportements ont changé : les internautes scrollent.

    Ceci dit, une page de 18 écrans avec autant d’images pose un autre problème qui lui risque vraiment de faire fuir les internautes : le temps de chargement !

  2. Les gens scrollent effectivement beaucoup plus qu’il y a quelques années grâce à l’invention de la molette sur les souris…

    Cependant, si scroller n’est pas gênant pour *lire* de manière méthodique, c’est une gêne indéniable pour la *recherche* d’information (scan de la page).

    Le question est donc : quelle proportion d’utilisateurs scannent la page par rapport à ceux la lisant méthodiquement ?

    Il est probable que pour répondre à ces deux modes de consommation, la page ne doit pas avoir une taille trop grande (2 à 2,5 écrans me semble correct).

  3. Gregoire tes chiffres montrent plutot que les gens ne scrollent pas tant que ça. En fait ces chiffres me semblent assez stables par rapport à ce qu’on savait déjà.
    Oui David, je partage aussi que la surface utile ne doit pas dépasser 2,5 écrans, au delà c’est pour le référencement.
    Donc à votre avis la page d’accueil de ce site est inefficace ? Ou alors nous sommes en présence d’un type de lectorat différent qui n’a pas les mêmes réflexes que le geek moyen…

  4. je ne suis pas sûr que le geek moyen soit le plus décontenancé par ce type de mise en page… C’est un mode de lecture qu’on retrouve sur bien des blogs (en général plus sobrement je l’accorde), blogs qui sont pas mal un truc de geeks moyens quand même 😉

  5. Quand je lit Google reader et que j’ai plusieurs dizaines (voire centaines) de news je scrolle plus que 18 écrans.
    Pour lire des news c’est pas génant vu que la page à une durée de vie très courte avant d’être réactualisée. Par contre pour une infos précise (une page que l’on est suceptible de bookmarker) c’est pas pratique.

  6. > Emmanuel : J’ai le sentiment que cette page est mieux adaptée à un public plus âgé, « lisant son journal sur internet » comme il lisait son journal papier… Je ne sais pas si j’approche une vérité ou si je divague !

    En suivant cette idée, je pense que cette population va décroître (non pas que l’âge va l’emporter dans l’au-delà, mais qu’en acquérant de l’expérience, elle va modifier sa façon de consommer l’information) au profit des scanneurs.

    Il me semble que les moteurs de recherche n’indexent que le début des pages, et de toute façon en donnant de moins en moins de poids aux mots les plus bas. Par conséquent, ce type de page n’est même pas adaptée aux moteurs…

    > Guillaume : un blog traite généralement un seul sujet, par conséquent *toute* la page est susceptible d’intéresser le lecteur (contrairement à celui d’un journal qui aborde des sujets très variés). De plus, la première page d’un blog est partiellement mise à jour : seuls les deux ou trois billets du haut de la page sont à lire à chaque visite.

    > Arnaud : je ferai les mêmes remarques que pour les blogs : sujets choisis par le lecteur (donc quasiment tout est à lire) et triés chronologiquement.

  7. A mon avis, le système peut avoir une cohérence et une pertinence en fonction du deal (implicite ou explicite) qui est passé avec l’internaute.

    Comme il est difficile d’appréhender l’ensemble de l’information disponible sur un site si elle est éclatée entre différentes pages, la promesse de ce média est peut être de dire que toute l’actualité du jour est présentée sur la page d’accueil. De sorte que l’internaute inquiet de rater quelque chose est sûr qu’il aura tout vu en parcourant cette page.

    Cela m’amène à une autre réflexion concernant l’économie de l’attention (attention economy). Il sera sans doute utile de définir des formats éditoriaux qui garantissent au lecteur des rapports temps de lecture/actualité. On peut imaginer « toute l’actualité people en 10 minutes », « toute l’actu économique en un quart d’heure ».

    Dans ce cas, il est évident que la promesse est valable si on reste sur la page. En revanche si l’internaute clique sur l’un des liens proposés, il accepte de passer plus de temps pour en savoir plus.

    C’est une idée, mais je ne suis pas sûr que ce soit extrêmement clair…

  8. Je crois que tu tiens le bon bout de l’explication … UNe autre façon de le dire c’est qu’au fond cette approche convient au contenu périssable et l’émotionnel donc plutôt le « magazine » que le quotidien traditionnel qui certes doit faire un choix de hierarchisation de l’actualité mais qui fonctionne plus comme une base de données ou l’utilisateur est amené à chercher le contenu qui lui est utile au delà de l’actu du jour.

  9. je ne sais pas quel poids fait cette page mais elle se charge assez vite (en adsl!). sinon je trouve l’alternace d’images et de texte assez conviviale.
    Le point fort du scroll est qu’il n’y a aucun attente une fois que la page est chargée…
    jm

  10. Scroller est plus réactif et les gens sont tellement pressé maintenant que cette pratique ne me surprend pas. Effctivement, l’abondance d’écrans est rédhibitoire.
    Sachant que pour accrocher efficacement un individu ( surtout et malheureusement les jeunes ) sur un rédactionnel, il faut se forcer à paragrapher en 4 lignes maximum -et je le constate toutes les semaines- cette surenchère me paraît un peu bancale.
    Et puis l’avantage, c’est que quand on a le temps, on hésite pas à s’enfoncer dans les méandres de sites ou blogs mais face à autant d’infos aussi mal amenées, la plupart des gens n’essayent même pas de lire.
    Bienvenue dans l’ère du zapping !

  11. Ce qui est remarquable, c’est que ces contenus étalés sur 18 écrans restent effectivement « en surface », sur la page d’accueil donc.
    D’où l’idée qu’il sont « superficiels », c’est à dire anecdotiques et en effet périssables.
    Ce qui compte c’est la UNE du jour, et le référencement n’a aucune importance.
    Le journal en question doit sûrement compter 1) sur la notoriété de sa marque pour être trouvé facilement dans les moteurs; 2) Google Ads; 3) De nombreux abonnés à sa newsletter.

    Menfin, pour scroller 18 écrans d’affilée faut vraiment être motivé. A noter que j’ai trouvé mieux ici, et en français, avec 21 écrans : http://www.desourcesure.com/

  12. A noter que la nouvelle version du site de 20minutes.fr compte désormais 15 écrans sur sa page d’accueil.
    Les versions espagnole (http://www.20minutos.es/) et suisse (http://www.20min.ch/) du journal sont elles aussi très longues.

    Comme Philippe Couve, je penche pour l’approche : « sur une page, toute l’actualité du jour ».

    Mais je crois que ce principe de page très longue provient de deux constats :
    . scroller n’est pas un problème
    . le haut débit permet d’afficher très rapidemment ces pages aussi longues. Pourquoi alors se priver d’une exposition en première page ? Si cela est déroutant la première fois, les lecteurs s’adaptent. Et préfèrent sans doute scroller plutot que d’avoir à cliquer sur une rubrique pour aller chercher une info.

    Peut etre allons-nous vers un partage entre des pages d’accueil au scroll réduit (2 ou 3 pages) ou au contraire très longues (plus de 10 pages).

  13. Je n’avais même pas remarqué cette particularité de 20minutes.fr !!
    Je vais demander à Jean-Pierre Govekar qui s’occupe du site d’expliquer ici la démarche…

    A priori justement 20minutes dépend justement d’un groupe scandinave et applique le même modèle sur ses sites.

  14. Tout à fait.

    Du coup j’ai fait une petite bafouille à ce sujet : http://www.chouingmedia.com/blog/20070401/20minutesfr__lergonomie_nouvelle_generation/

    N’empeche, suédois ou pas, on s’éloigne très nettement d’une présentation jusque maintenant héritée de la presse : une « Une » qui renvoie dans les pages du journal.
    La nous sommes dans une information à plat, où même le rubricage finit par perdre son sens.
    C’est très intéressant comme démarche.

    Je vais demander à mes contacts aussi 🙂

  15. La lecture des commentaires oblige aussi à scroller…
    Surtout s’il y en a beaucoup.
    Je me demande si avec l’évolution de tout ce matériel informatique nous allons voir apparaître de nouvelles formes de maquettage du même genre,si elles vont perdurer et devenir des normes. Que d’écart avec la presse papier! Que de possibilités et d’écueils!!
    Ces écrans à la suite mélangent tous les sujets. Les ados sont déjà paumés mais ils sont les premiers consommateurs d’internet. Tout mélanger est aussi dangereux que vouloir tout catégoriser mais je reste partisan d’un classification en rubriques.
    Cela dit, je découvre internet et son monde parallèle, donc cet avis est celui d’un néophyte. Je suis en général perdu devant certains sites où l’on vous propose une avalanche d’infos et aucun guide pour vous faciliter la tâche.

  16. Bonsoir Emmanuel, je dirais simplement qu’il s’agit d’une recette « in house » basée sur plus de 5 ans de d’expérience utilisateur web à 20 Minutes à laquelle s’ajoute l’expérience de notre actionnaire norvégien, le groupe de presse Schibsted, très innovant et en avance sur le traitement et la présentation de l’information numérique (web / mobile).
    On sort enfin de l’âge de pierre du web où l’on n’envisageait les sites d’information que comme une déclinaison des titres papier.
    Pour citer Benoît Darcy qui me disait hier encore : « les stratégies gagnantes sont ‘disruptives’, celles qui innovent. » Sans oublier que nous (multi-médias d’information) nous adressons de plus en plus à un public « digital user » si ce n’est « digital native » !

  17. Vivendi ? jamais entendu parler… 😉
    On parlait de Free je crois, et de son 29,90 avant tout le monde…
    Bon les gars, la prochaine fois je vous fais le coup de la fracture numérique. Stay tuned.

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